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Septembre 2013
Voici d’abord le contenu du tract que nos camarades ont récemment distribué :
États Unis, Turquie, Canada, Arabie Saoudite et France soutiennent l’intervention militaire ; le parlement anglais s’est prononcé contre ; Allemagne et Japon se montrent "réservés" ; Russie, Chine, Indonésie, Argentine, Brésil, Afrique du Sud et Italie ainsi que le secrétaire général de l’ONU, sont opposés à l’intervention. Le Pape François s’est prononcé contre la guerre et le président du Vénézuela a envoyé une lettre à Obama afin qu’il renonce à toute attitude belliqueuse.
La presse bourgeoise amoncelle les mensonges des deux fronts impérialistes qui s’affrontent dans la région. Même Obama a admis ne pas pouvoir « honnêtement démontrer que l’usage des armes chimiques par Assad contre femmes, enfants et civils innocents représente une menace immédiate pour la sécurité des États Unis ». Il exalte cependant l’appui de la communauté internationale à une attaque contre la Syrie, et insiste pour imposer l’application de normes internationales qui interdisent les armes chimiques.
Derrière ces hypocrites dénonciations "humanitaires" et ces discours sur la "démocratie" se cachent les raisons économiques qui ont produit la crise. La classe ouvrière ne doit se faire manipuler par aucune des bandes impérialistes qui interviennent dans les guerres uniquement pour le contrôle des marchés des matières premières stratégiques.
Face à ses objectifs, les USA n’ont pas hésité non plus à appuyer en Syrie ces forces extrémistes islamistes qu’ils combattent ailleurs en tant que "terroristes". Les moyens de communications et les soi-disant "organisations humanitaires" complètent le cadre des forces engagées dans le conflit. Les travailleurs savent que la préoccupation concernant l’usage des armes chimiques, les morts et les souffrances de la population syrienne est une tromperie utilisée par les puissances impérialistes pour justifier une nouvelle guerre.
La Syrie n’est que le théâtre opératif du conflit qui opposent les fronts impérialistes comme cela est déjà arrivé en Afghanistan, en Irak, en Libye.
Après la guerre, dans chaque pays occupé, les puissances se partagent les affaires, et à cette répartition participent souvent aussi les factions qui se sont combattues. Il suffit de vérifier quels sont les pays et les entreprises qui contrôlent la circulation du pétrole et la reconstruction des infrastructures en Irak ou en Libye. Les intérêts militaires et géopolitiques sont le reflet des intérêts économiques des multinationales et de leurs gouvernements. Ceci ne pourra pas être caché, quelque soit le rapport de l’ONU sur l’usage des armes chimiques de la part du gouvernement syrien.
La classe ouvrière syrienne restera opprimée qu’elle demeure sous le gouvernement actuel ou que ce dernier soit remplacé par un nouveau soutenu par les États Unis ou la Russie ; ce qui changera sera la répartition du contrôle du pétrole et du gaz.
La lutte de classe, qui dans cette époque historique se réduit au heurt entre bourgeoisie et prolétariat, se place au delà des ces guerres de conquêtes entre bourgeoisies.
Les conflits militaires font aussi partie de l’oppression du prolétariat et de la contre-révolution. Il en est de même si la classe ouvrière en ce moment ne réussit pas à combattre pour elle-même et que de toutes parts se lèvent les drapeaux patriotiques et contre-révolutionnaires : le prolétariat se trouve désorganisé ou contrôlé par des partis alignés sur l’un ou l’autre des blocs impérialistes. Le prolétariat syrien est déjà dans le troisième conflit mondial, et nous communistes savons bien qu’il n’y a pas pire situation que la guerre pour empêcher le travail révolutionnaire des organisations et parti de classe.
Seule la renaissance de la lutte de classe prolétarienne dans des pays comme les USA, la Russie, la Chine, l’Allemagne et les autres métropoles impérialistes pourra empêcher les guerres et ouvrir la voie à la révolution sociale planétaire.
La classe travailleuse se mobilisera dans le monde entier en unissant ses revendications économiques immédiates à la lutte pour la conquête du pouvoir politique et l’instauration de la dictature du prolétariat.
Transformer la guerre impérialiste en guerre révolutionnaire, sous la direction du prolétariat et de son parti. Dans tous les pays les armes de la guerre se retourneront alors contre les bourgeoisies de ces États.
Ou guerre mondiale impérialiste ou révolution communiste
mondiale !
Et voici l’article :
Cela fait déjà plus de deux ans que la Syrie est devenu le champ de bataille des impérialistes. Durant toute cette période un savant dosage des ravitaillements a été réalisé de façon à ce que les différentes parties se soient massacrées sans qu’une seule ait réussi à prévaloir. Les divers groupes de rebelles, qu’ils soient syriens ou étrangers, divisés en de nombreuses factions en guerre aussi entre elles, sont armés et manipulés par les États-Unis, la Grande Bretagne, la France, la Turquie et aidés financièrement par les monarchies du Golfe Persique, en premier lieu l’ Arabie Saoudite et le Qatar.
Le régime, nonobstant qu’il dispose d’armes lourdes, de l’aviation et de l’aide de la Russie et de l’Iran, n’a pas réussi à tenir toutes les régions du pays ; après avoir perdu d’importantes positions surtout aux frontières avec la Turquie et la Jordanie, il n’a réussi que ces derniers mois à passer à la contre-attaque grâce à l’intervention des guérilleros chiites libanais, bien entraînés et motivés, du mouvement Hezbollah.
Actuellement, après que soient restés sur le terrain presque 100 000 morts, Washington a menacé d’intervenir ouvertement dans la guerre, en justifiant son intervention par la violation du "droit international" que tous les États, Washington compris, ont toujours ignoré comme du vieux papier.
Mais les hiérarchies US ne s’accordent pas sur cette action. Pendant le débat précédent la décision du Congrès, le Chef des États Majors, Martin Dempsey, a exprimé plusieurs fois sa perplexité comme le rapporte Il Sole 24 Ore du 8 septembre – et l’ex commandant de l’Army War College, sur le Washington Post, a clairement écrit que les Forces armées sont opposées à cette guerre dont les objectifs apparaissent obscurs. Parmi les politiciens aussi, la ligne de démarcation ne passe pas entre les deux partis, démocrate et républicain, mais entre des députés et sénateurs selon les intérêts qu’ils représentent.
Le motif de cette incertitude se tient dans le fait que les objectifs à court terme de l’intervention sont inexistants : il ne s’agit pas d’abattre le régime d’Assad qui a toujours représenté un excellent défenseur du status quo en Syrie et au Liban, et qui a réussi à tenir en respect le mouvement des Frères Musulmans, dont il a massacré de façon exemplaire des dizaines de milliers de militants ; on ne peut donc pas trop affaiblir son armée. Dans le même temps, il s’agit d ’éviter que les groupes de la guérilla salafiste prennent la direction du mouvement armé anti-régime ; avec les pays de l’Afrique du Nord en ébullition, il s’agit d’éviter le danger de voir naître, également en Syrie, un régime confessionnel, anti-occidental et célébrant la Charia. Cette "intervention punitive" ne devrait pas résoudre la situation actuelle mais plutôt perpétuer l’actuel système.
Apparaissent plus clairement au contraire les objectifs globaux et à long terme d’une éventuelle intervention américaine, qui perpétuerait cette stratégie pour le maintien de l’hégémonie mondiale débutée en 2001 avec la guerre en Afghanistan et poursuivie avec la guerre contre l’Irak, et ensuite contre la Libye. Ces guerres n’ont pas représenté des succès sur le plan militaire : la guerre en Afghanistan s’est conclue par une défaite substantielle, avec le retrait des troupes, comme celle déjà effectuée en Irak ; et en Libye aussi la chute du régime de Kadafi a entraîné une situation chaotique avec l’effondrement de l’Etat central remplacé par des pouvoirs locaux en désaccord entre eux.
Ces guerres, qui ont causé la mort de centaines de milliers de civils et des destructions énormes, ont aussi constitué une véritable saignée pour le bilan des USA, mais elles ont servi au complexe militaro-industriel US à continuer de maintenir le plus haut niveau de dépenses militaires au monde, équivalent à 50% du total mondial.
Il y a quelques mois, le Pentagone a revu sa stratégie concernant le maintien de la suprématie des États-Unis au niveau mondial, en affirmant que la priorité de l’engagement devrait se déplacer vers l’Océan pacifique, pour lutter contre la nouvelle menace du géant chinois qui, grâce à des investissements importants pour son réarmement, cherche ces dernières années à élargir sa zone d’influence, surtout à proximité des côtes et de rendre plus sures les routes maritimes et terrestres pour son commerce, entrant ainsi en collision avec les alliés historiques des USA dans la région, Japon, Corée du Sud, Philippines, et également Vietnam.
La guerre en Syrie pourrait donc apparaître en contradiction par rapport à la nouvelle stratégie planétaire de Washington, mais il n’en est rien.
La Syrie, entre la Méditerranée, la Turquie, l’Irak, la Jordanie, Israël, et le Liban, est une zone de passage entre l’Orient et l’Europe. Il existe le projet d’un oléoduc traversant l’Irak et la Syrie pour transporter les énormes réserves de gaz découvertes en Iran vers la Méditerranée. Ceci renforcerait l’Iran, tandis que les États-Unis et certains États alliés des USA, comme le Qatar et l’ Arabie Saoudite, y perdraient économiquement et politiquement, puisque le gaz irait satisfaire le grand besoin qu’en a l’Europe. On peut ajouter à cela que précisément en Syrie ont été découverts d’importants gisements de gaz naturel.
Actuellement la tragique situation de l’Irak et de la Libye, bien loin pour le moment de pouvoir assurer l’extraction de pétrole dans des quantités rattrapant celles d’avant la guerre, et les accords entre USA et Arabie Saoudite qui limitent l’activité extractive de cette dernière, contribuent à maintenir le prix du pétrole suffisamment élevé de façon à rendre économiquement avantageux pour l’industrie US l’extraction de gaz et de pétrole de schistes sur son propre territoire.
La première conséquence de la menace d’attaque contre la Syrie a été en fait celle d’une augmentation du prix du pétrole ; une attaque effective pourrait avoir des conséquences négatives pour les pays dépendants du pétrole médio-oriental, mais elle aurait des conséquences positives pour l’économie US qui ne dépend pas de ce pétrole.
Ce n’est pas un hasard par conséquent si, lors de la réunion du G20 à Moscou les premiers jours de septembre, le Vice ministre chinois pour l’économie ne s’est pas perdu en bavardages humanitaires, mais a dit que l’attaque contre la Syrie aurait des répercussions néfastes sur l’économie mondiale en raison de la forte augmentation du prix du pétrole, d’où l’opposition nette de la Chine, le plus grand importateur de pétrole au monde. En frappant la Syrie, les États-Unis frapperaient par conséquent en premier lieu la Chine.
La Russie, exportatrice de gaz et de pétrole, surtout vers l’ Europe, serait avantagée par une augmentation du prix, mais subirait un camouflet avec l’affaiblissement ou la chute du régime d’Assad ; la Syrie est traditionnellement liée à la Russie qui lui fournit des armes et des instructeurs pour son armée, et maintient dans le port méditerranéen de Tartous l’unique base de sa flotte en Méditerranée. Moscou craint en outre un renforcement des groupes terroristes musulmans, qui, le travail en Syrie terminé, pourraient se déplacer vers la Tchéchénie dévastée et en rallumer la guérilla.
L’Europe a encore une fois démontré qu’elle n’existe pas en tant que sujet politique unitaire et la voix de ses représentants, même opposés en majorité à une intervention unilatérale, a eu peu d’échos. Plus significative est le non décidé de l’Allemagne, opposé au oui décidé de la France, nonobstant le fameux axe Paris-Berlin ! L’économie européenne qui dépend des approvisionnements de gaz provenant aussi bien de Moscou que du Moyen Orient, n’a rien à gagner de cette guerre malgré les intérêts impérialistes de Paris dans la région.
L’Afrique du Sud est contraire à l’idée d’une intervention militaire, comme les pays les plus importants d’Amériques latine, de l’ Argentine au Brésil, Mexique, et Vénézuela.
Israël a cherché à maintenir une position discrète et ne bat pas les tambours de guerre, tout en réaffirmant le pacte d’acier avec Washington, mais même Tel Aviv, rangée sur la ligne de feu, aurait bien peu à gagner de cette guerre, du moins dans l’immédiat.
Sur le front interventionniste se trouvent ouvertement en premier lieu l’Arabie Saoudite, « premier client du complexe militaro-industriel américain », dont le gouvernement joue le rôle de protecteur des musulmans sunnites afin d’élargir son influence régionale et qui est engagé dans une dure confrontation avec l’Iran chiite. Sur la même ligne se meut le Qatar, petit État mais économiquement très puissant, exportateur de pétrole et de capitaux, ayant une grande influence sur certaines économies européenne comme celles française, anglaise et aussi allemande. Ces deux puissances pétrolifères et financières, très actives également dans la crise égyptienne, là où pourtant elles se sont trouvées sur des fronts opposés, l’Arabie Saoudite défendant l’armée, et le Qatar se plaçant aux côtés des Frères Musulmans, se retrouvent maintenant unies pour réclamer à grands cris l’intervention militaire jusqu’à la chute du régime d’Assad et la formation d’un gouvernement guidé par les chefs de la guérilla sunnite, une perspective qui conduirait à l’isolement de Téhéran, mais qui n’est pas beaucoup appréciée par Washington.
Le gouvernement turc, qui durant cette longue guerre s’est plusieurs fois violemment heurté à celui syrien, après la reculade des États-Unis, s’est trouvé tout aussi dérouté. En plus de soutenir les guérilleros sunnites, se pose également pour Ankara le problème de tenir en respect la minorité kurde présente aussi bien en territoire turc que dans celui syrien, et que Damas a toujours protégée.
Dans cette situation extrêmement fragmentée, l’action diplomatique de Moscou semble avoir été accueillie avec soulagement par de nombreux pays, non seulement ceux de l’aire médio-orientale. Il est facile de comprendre que les conséquences d’une intervention directe des États-Unis auraient été bien difficilement contrôlables, et qu’il aurait été improbable d’exclure la possibilité d’un élargissement du conflit au Liban, à Israël et à l’Iran. Ceci aurait pu signifier le début de la guerre mondiale entre les impérialismes, que la crise économique de surproduction prépare, mais qui semble encore prématurée. Washington doit par conséquent se mouvoir avec prudence et doit aujourd’hui se contenter d’affirmer hypocritement que ce n’est pas l’action de la diplomatie moscovite, mais la menace des ses missiles US, qui a contraint Assad à être plus conciliant.
Le prolétariat syrien et international n’a pas de camp à choisir dans ces jeux de guerre, un front où se ranger, les deux représentant des intérêts impérialistes et réactionnaires. Le mouvement prolétarien doit s’opposer à cette dynamique qui prépare une guerre destructrice d’hommes par millions et de marchandises en excès,en faisant résonner à nouveau le cri de l’Internationale Communiste : NON A LA GUERRE ENTRE LES ETATS, POUR LA GUERRE ENTRE LES CLASSES ! POUR LA RÉVOLUTION PROLÉTARIENNE INTERNATIONALE.