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La fière colère des travailleurs agricoles immigrés a finalement explosé. Distribuant les coups de poings aux lèches cul du capital et de son soi disant progrès. La grève à Rosarno, Calabria, qui s’en est suivi, ne relève pas d’une guerre entre races, mais de l’affrontement entre classes sociales opposées. Elle appartient à la lutte des ouvriers agricoles, avec ses traits tumultueux caractéristiques de son histoire séculaire. D’un côté un groupe de purs prolétaires salariés qui, comme tous ceux de leur classe, n’ont rien à perdre et sont sans patrie, et de l’autre les propriétaires fonciers, les capitalistes agraires avec leur État et sa police, et leurs janissaires armés.
Il a suffi que la classe se mette debout pour terroriser les bourgeois et petits bourgeois et leurs hommes de main.
S’il est vrai que les conditions de logement, de rétributions et de travail sont celles "d’esclaves", comment se fait-il que les bourgeois bien pensant subitement les découvrent et s’en lamentent? Nos bons bourgeois sont toujours aussi hypocrites. C’est bien pour ces raisons qu’ils font venir de la main d’oeuvre immigrée: pour abaisser les salaires et aggraver les conditions de travail. Qu’elles sont depuis toujours les conditions de vie de la couche la plus précaire et mobile des travailleurs? Ce sont celles qui se trouvent à la limite de la survie avec les heures de travail les plus longues et des salaires dérisoires. Voilà les conditions de vie et de travail normales auxquelles tendent toute la classe ouvrière sous le capitalisme, que ce soit lors de sa naissance au 16° siècle, ou aujourd’hui, tandis qu’il est devenu un gigantesque corps parasitaire, moribond et en pleine putréfaction.
Est-elle différente la condition des jeunes travailleurs précaires dans le Nord, de citoyenneté italienne et de race blanche? Gagnent-ils plus que les 30 € par jour des travailleurs noirs? Ne sont ils pas aussi licenciés sans préavis et sans toucher les arriérés de salaires, quand cela convient aux patrons?
Le racisme, fruit d’une campagne de propagande, bien organisée par les propagandistes du régime bourgeois, sert à diviser le front de la classe ouvrière et à empêcher toute unité. L’autre grande fracture est celle imposée entre ouvriers anciens, aux contrats à durée indéterminée, et les jeunes aux emplois précaires et sans aucune garantie. Il ne s’agit pas d’opposer au racisme l’antiracisme, ni "d’intégrer" dans "notre" société les travailleurs immigrés, mais de les intégrer dans notre classe et ses luttes. Et à intégrer, comme l’on peut voir, il ne s’agit pas des ouvriers agricoles immigrés, mais bien des ouvriers italiens !
Aucune de ces simples vérités ne transparaît du comportement des syndicats de régime ! Voyez par exemple le document de la Fiom, et aussi celui de la RdB.
Toute la situation est imputée à "la criminalité locale", comme si le problème ne venait pas de la société capitaliste, mais résultait de comportement "immoraux" ou était "d’ordre public". Situation contre laquelle le prolétariat est invité à lutter avec les bourgeois "honnêtes" afin d’assainir les fondements de l’État. Seuls des syndicats pourris jusqu’à la moelle et vendus peuvent faire de telles analyses. La classe ouvrière n’a pas à "améliorer" l’État capitaliste, mais au contraire elle doit le combattre par tous les moyens. On ne voit pas non plus comment la "ndrangeta" pourrait être pire que l’État à pressurer les travailleurs pour le compte de la bourgeoisie.
La vraie responsabilité des dures conditions de vie et de travail des travailleurs immigrés est à inscrire aux lois de l’État bourgeois, qui les contraint à rester sans papier et dans la semi-clandestinité. Et cela pour répondre à la faim insatiable de travailleurs taillables et corvéables à merci du capital ! Mais ceci est possible, parce que les syndicats de régime, Cgil-Cisl-Uil-Ugl, n’ont rien fait pour s’y opposer et ne se sont jamais préoccupés de la grande masse des travailleurs immigrés contraints à la clandestinité ! Complices du capital, complices ils le sont des conditions esclavagistes réservées à cette couche du prolétariat.
La défense de la classe ouvrière passe par la défense de sa partie la plus faible, par la lutte contre l’organisation bourgeoise du travail précaire et clandestin qui vise à imposer les salaires les plus bas et les pires conditions de travail. Les syndicats ont abandonné les immigrés "irréguliers", tout comme ils ont préparé et accepté la "régularisation" du travail précaire des jeunes (et des vieux en France). Car ce sont des syndicats de traîtres et de vendus au régime, tout comme l’étaient les syndicats fascistes en leur temps.
L’organisation commune de tous les types de salariés et la bataille syndicale pour des objectifs communs, avec la mobilisation et la force des réguliers, commence par défendre avant tout ces derniers et les jeunes précaires.
Les antiracistes qui organisent les immigrés en tant que tel, et non avec les travailleurs italiens, qui traitent le racisme comme une maladie, de laquelle doit guérir la société, non pas comme une arme aux mains de la bourgeoisie dans sa guerre permanente contre la classe travailleuse, expriment seulement un mouvement d’opinion petit bourgeois étranger à la classe ouvrière. C’est un antiracisme qui ne nie aucune des prémisses sociales du racisme.
Plus les conditions des travailleurs de toutes les nations, de toutes les races et catégories deviennent semblables, plus facile et nécessaire devient l’organisation de leur unité sur le plan syndical et politique et le retour à leurs traditions de classe et à leur perspective d’émancipation.
Pour cette raison, nous tournant vers la classe prolétarienne, à
Rosarno,
comme en tout autre lieu du monde, nous crions et les invitons à crier
notre unique consigne: Prolétaires de tous les pays
unissez vous !
Dans tous les pays la bourgeoisie cache au prolétariat cette vérité profonde, en enfermant la vision de ses problèmes dans les limites bornées de l’horizon national. Les médias de masse, par une campagne raciste cynique et bien organisée, sécrètent la méfiance et la haine entre prolétariat indigène et immigré. Dans cette infamie les démocraties se montrent plus sophistiquées et efficaces que les régimes dictatoriaux ouvertement racistes du passé et du présent.
La propagande bourgeoise pour le racisme profite de la concurrence entre travailleurs immigrés et indigènes crée par la bourgeoisie, pour les diviser, les affaiblir et mieux les exploiter. En tant que tel le racisme ne se différencie pas des autres moyens de division utilisés par le patronat, comme l’emploi de travailleurs précaires, la soustraitance, la fracture entre ouvriers âgés, à l’emploi garanti, et jeunes travailleurs privés de toutes garanties d’emploi et de prévoyance. Autre division, la concurrence entre travailleurs de différentes entreprises obtenue par les contrats non plus à l’échelle nationale, mais locale.
Pour cette raison le racisme n’est pas une "maladie" dont la société bourgeoise pourrait guérir, mais il est le fruit de ses conditions d’existence, et c’est une arme dans la guerre de classe entre prolétariat et capital. Le racisme disparaîtra seulement quand cessera la lutte des classes avec l’extinction des classes. Ce qui n’est possible que par l’émancipation du prolétariat avec l’abolition du salariat dans le Communisme.
Pour cette raison, vouloir combattre le racisme par l’antiracisme, sur le plan abstrait des idées et des valeurs morales, non seulement est stérile, mais est nuisible en véhiculant des illusions et en entraînant le prolétariat sur un terrain qui n’est pas celui de la lutte des classes. C’est justement dans la lutte contre la bourgeoisie que le prolétariat dépasse toutes ces divisions et découvre le sens de la fraternité et de la solidarité. Le Communisme ne sera pas une impossible médiation interculturelle, mais le dépassement et la synthèse des anciennes cultures historiques que l’homme a connues, dans une forme supérieure qui les niera tout en les dépassant.
La lutte à engager aujourd’hui est au contraire celle classiste du prolétariat qui a pour objectif son union. Son but est d’empêcher l’emploi des travailleurs à des conditions plus mauvaises; que ce soit un salaire inférieur, une plus grande possibilité de licenciement, où l’ignoble expulsion du pays en cas de licenciement ! La vraie lutte de la classe ouvrière coïncide avec la défense de sa partie la plus faible: par cette conditions les travailleurs qui sont relativement moins exploités, en soutenant leur frère de classe les plus précaires, se défendent euxmême de la concurrence qui les entraînent vers des conditions de vie plus dégradées.
Ces principes simples et sains de la lutte des classes ont été ensevelis, à l’échelle internationale, par les syndicats de régime qui agissent partout suivant une méthode diamétralement opposée. Ils ont appliqué avec l’État et le patronat une tactique qui a consisté d’abord à attaquer les plus faibles, c’estàdire, les immigrés, les jeunes, ceux qui travaillent dans de petites entreprises pour ensuite s’attaquer au cercle des ouvriers qui ont un contrat à durée indéterminé, obtenant ainsi la défaite de l’ensemble de la classe ouvrière.
Dans tous les pays, les syndicats officiels (en Italie la Cgil-Cisl-Uil-Ugl, en France la Cgt-Cfdt-Fo, en Angleterre les Trade Unions, etc..) sont tous irréversiblement passés du côté du patronat. Et tous ceux qui continuent à y militer, avec pour objectif de les redresser et de les conquérir, n’ont obtenu en 30 ans pour tout résultat, (voyer la gauche de la Cgil en Italie) que de faciliter leur action antiouvrière en maintenant l’illusion d’un pluralisme interne. Ce qui contribue à retarder leur boycott et l’indispensable reconstruction d’un vrai syndicalisme de classe.
Mais aujourd’hui celui qui, prenant comme prétexte la trahison de la Cgil-Cisl-Uil, proclame vouloir lutter contre le racisme en dehors du champs syndical, en organisant des manifestations interclassistes et propose la grèves des seuls travailleurs immigrés, impossible à réaliser et dès le départ voué à l’échec, contribue encore plus à la désorientation et à la confusion.
Le chemin obligatoire est celui de la reconstruction de l’organisation syndicale de classe, structurée sur une base territoriale (et non pas celle de l’entreprise), comme dans la tradition des bourses du travail, en unissant les catégories, en encadrant les travailleurs des petites et grandes entreprises qui luttent suivant les principes de la lutte de classe. Un mouvement qui, par exemple loin de prendre ses distances visàvis des luttes comme celle des travailleurs agricoles de Rosano et leur saine réaction contre les exactions patronales, les fait siennes et se pose sérieusement l’objectif d’un mouvement toujours plus vaste qui culminera dans une grève générale pour imposer les vrais objectifs immédiats de la classe ouvrière :
- Réduction des horaires de travaille sans perte de salaire !
- Salaire garanti pour les ouvriers au chômage !
- Augmentation des salaires, plus forte pour les catégories les moins
bien payées !
- Droit de citoyenneté pour les travailleurs immigrés !