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Revue Bilan (1933-37) LA QUESTION DE LA PALESTINE ET DE L’UNITÉ ARABE Le conflit arabo-juif en Palestine Bilan n° 31 (mai-juin 36) Bilan n° 32 (Juin-juillet 36) Le monde arabe en ébullition Bilan n°44 octobre-novembre 1937 |
Bilan n° 31 (mai-juin 36)
Le conflit arabo-juif en Palestine
L’aggravation du conflit arabo juif en Palestine, l’accentuation de l’orientation anti britannique du monde arabe qui pendant la guerre mondiale fut un pion de l’impérialisme anglais, nous a déterminé à envisager le problème juif et celui du mouvement nationaliste pan-arabe. Nous essayerons cette fois ci de traiter le premierde ces deux problèmes.
On sait qu’après la destruction de Jérusalem par les Romains et la dispersion du peuple juif, les différents pays où ils allèrent lorsqu’ils ne les expulsaient pas de leurs territoires (moins pour des raisons religieuses invoquées par les autorités catholiques que pour des raisons économiques, notamment la confiscation de leurs bien et l’annulation de leur crédit), en réglèrent les conditions de vie d’après la bulle papale de la moitié du 16e siècle qui fit règle dans tous les pays, en les obligeant à vivre enfermés dans des quartiers fermés (ghetto) et en les obligeant à porter un insigne infamant.
Expulsés en 1290 de l’Angleterre, en 1394 de la France, ils émigrèrent en Allemagne, en Italie, en Pologne; expulsés en 1492 de l’Espagne et en 1498 du Portugal, ils se réfugièrent en Hollande, en Italie et surtout dans l’Empire Ottoman qui occupait alors l’Afrique du Nord et la plus grande partie de l’Europe du sud-est; là ils formèrent et forment même aujourd’hui cette communauté parlant un dialecte judéo-espagnol, alors que ceux émigrés en Pologne, en Russie, en Hongrie, etc., parlent le dialecte judéo-allemand (Yiddish). La langue hébraïque qui reste pendant cette époque la langue des rabbins fut retirée du domaine des langues mortes pour devenir la langue des juifs de Palestine avec le mouvement nationaliste juif actuel.
Pendant que les juifs de l’Occident, les moins nombreux, et partiellement ceux des Etats-Unis, ont acquis une influence économique et politique au travers de leur influence boursière et une influence intellectuelle par le nombre d’entre eux qui se trouvent dans les professions libérales, les grandes masses se concentrèrent dans l’Europe orientale et déjà, à la fin du 18e siècle, groupaient les 80% des juifs d’Europe. Au travers du premier départage de la Pologne et de l’annexion de la Bessarabie (1), ils passèrent sous la domination des tzars qui, au commencement du 19e siècle, avaient sur leurs territoires les deux tiers des juifs. Le gouvernement russe adopta dès ses débuts une politique répressive datant de Catherine II et qui trouva son expression la plus farouche sous Alexandre III qui envisageait la solution du problème juif de cette façon : un tiers doit être converti, un tiers doit émigrer et un tiers doit être exterminé. Ils étaient enfermés dans un certain nombre de districts de provinces du nord-ouest (Russie Blanche), du sud-est (Ukraine et Bessarabie) et en Pologne. C’était là leurs zones de résidences. Ils ne pouvaient habiter en dehors des villes et surtout ils ne pouvaient habiter les régions industrialisées (bassins miniers et régions métallurgiques). Mais c’est surtout parmi ces juifs que se fit jour la pénétration du capitalisme au 19e siècle et que se détermina une différenciation des classes.
Ce fut la pression du terrorisme gouvernemental russe qui donna la première impulsion à la colonisation palestinienne. Cependant les premiers juifs revinrent en Palestine déjà après leur expulsion d’Espagne à la fin du 15e siècle et la première colonie agricole fut constituée en 1870 près de Jaffa. Mais la première émigration sérieuse commença seulement après 1880, quand la persécution policière et les premiers pogromes déterminèrent une émigration vers l’Amérique et vers la Palestine.
Cette première "Alya" (immigration juive) de 1882, dite des "Biluimes", était en majorité composée d’étudiants russes qui peuvent être considérés comme les pionniers de la colonisation juive en Palestine. La seconde "Alya" se vérifia en 1904-05, en répercussion de l’écrasement de la première révolution en Russie. Le nombre des juifs établis en Palestine qui était de 12 000 en 1850, monta à 35 000 en 1882 et 90 000 en 1914.
C’était tous des juifs de Russie et de Roumanie, intellectuels et prolétaires, car les capitalistes juifs de l’Occident se limitèrent, comme les Rothschild et les Hirsch, à un soutien financier qui leur donnait un bénévole renom de philanthropie, sans qu’il soit nécessaire pour eux de donner de leur précieuse personne.
Parmi les "Biluimes" de 1882, les socialistes étaient encore peu nombreux et cela parce que dans la controverse de l’époque, à savoir si l’émigration juive devait être dirigée vers la Palestine ou l’Amérique, ils étaient pour cette dernière. Dans la première émigration juive aux Etats-Unis, les socialistes furent donc très nombreux et y constituèrent de bonne heure des organisations, des journaux et pratiquement même des essais de colonisation communiste.
La seconde fois que se posa la question de savoir vers où diriger l’émigration juive, ce fut comme nous l’avons dit, après la défaite de la première révolution russe et par suite de l’aggravation des pogroms caractérisée par celui de Kitchinew (2).
Le sionisme qui tentait à assurer au peuple juif un siège en Palestine et qui venait de constituer un Fonds National pour acquérir les terres se divisa alors au 7e Congrès sioniste de Bâle en courant traditionnaliste qui restait fidèle à la constitution de l’Etat juif en Palestine et en territorialistes qui étaient pour la colonisation même ailleurs et dans le cas concret, en Ouganda offerte par l’Angleterre.
Seule une minorité de socialistes juifs, les Poalés sionistes de Ber Borochov (3), restèrent fidèles aux traditionnalistes, tous les autres partis socialistes juifs de l’époque, comme le parti des socialistes sionistes (S. S.) et les Serpistes - une espèce de reproduction dans les milieux juifs des S. R. russes - se déclarèrent pour le territorialisme. La plus ancienne et la plus puissante organisation juive de l’époque, le Bund, était, comme on le sait, tout à fait négative au sujet de la question nationale, du moins à cette époque.
Un moment décisif pour le mouvement de renaissance nationale fut ouvert par la guerre mondiale de 1914, et après l’occupation par les troupes anglaises de la Palestine, auxquelles s’était ralliée la Légion juive de Jabotinsky (4), fut promulguée la déclaration de Balfour de 1917 qui promettait la constitution en Palestine du Foyer National Juif.
Cette promesse eut sa sanction à la Conférence de San Remo de 1920 qui mit la Palestine sous mandat anglais.
La déclaration de Balfour détermina une troisième "Alya", mais ce fut surtout la quatrième, la plus nombreuse, qui coïncida avec la remise du mandat palestinien à l’Angleterre. Cette "Alya" eut déjà en son sein des couches assez nombreuses de petits bourgeois. On sait que la dernière immigration en Palestine qui a suivi l’avènement d’Hitler au pouvoir et qui est certainement la plus importante contient déjà un fort pourcentage de capitalistes.
Si le premier recensement effectué en 1922, en Palestine eu égard aux ravages de la guerre mondiale n’avait enregistré que 84 000 juifs, les 11 pour cent de la population totale, celui de 1931 en enregistra déjà 175 000. En 1934, les statistiques donnent 307 000 sur une population totale d’un million 171 000. Actuellement on donne comme chiffre 400 000 Juifs.
Les 80 pour cent des juifs sont établis dans les villes dont le développement est illustré par l’apparition rapide de la ville champignon de Tel-Aviv; le développement de l’industrie juive est assez rapide : en 1928 on comptait 3.505 entreprises dont 782 avaient plus de 4 ouvriers, c’est-à-dire au total 18 000 ouvriers avec un capital investi de 3,5 millions de Livres sterlings.
Les juifs établis dans les campagnes représentent seulement les 20 pour cent face aux arabes qui forment les 65% de la population agricole. Mais les fellahs travaillent leurs terres avec des moyens primitifs, les juifs au contraire dans leurs colonies et plantations travaillent selon les méthodes intensives du capitalisme avec de la main-d’œuvre arabe à salaires très bas.
Les chiffres que nous avons donnés expliquent déjà un côté du conflit actuel. Depuis 20 siècles les juifs ont abandonné la Palestine et d’autres populations se sont installées sur les rives du Jourdain. Bien que les déclarations de Balfour et les décisions de la Société des Nations prétendaient assurer le respect du droit des occupants de la Palestine, en réalité l’augmentation de l’immigration juive signifie chasser les arabes de leurs terres même si elles sont achetées à bas prix par le Fonds National Juif.
Ce n’est pas par humanité envers "le peuple persécuté et sans patrie" que la Grande-Bretagne a choisi une politique philo juive. Ce sont les intérêts de la haute finance anglaise où les juifs ont une influence prédominante qui ont déterminé cette politique. D’autre part, dès le début de la colonisation juive on remarque un contraste entre les prolétaires arabes et juifs. Au commencement les colons juifs avaient employé des ouvriers juifs parce qu’ils exploitaient leur ferveur nationale pour se défendre contre les incursions des arabes. Puis après, avec la consolidation de la situation, les industriels et les propriétaires fonciers juifs préférèrent à la maind’œuvre juive plus exigeante, celle des arabes.
Les ouvriers juifs, en constituant leurs syndicats, bien plus qu’à la lutte des classes, s’adonnèrent à la concurrence contre les bas salaires arabes. Cela explique le caractère chauvin du mouvement ouvrier juif qui est exploité par le nationalisme juif et l’impérialisme britannique.
Il y a naturellement aussi des raisons de nature politique qui sont à la base du conflit actuel. L’impérialisme anglais, en dépit de l’hostilité des deux races, voudrait faire cohabiter sous une même toiture deux Etats différents et créer même un biparlementarisme qui prévoit un parlement distinct pour juifs et arabes.
Dans le camp juif, à côté de la directive temporisatrice de Weissman, il y a les révisionnistes de Jabotinsky (5) qui combattent le sionisme officiel, accusent la Grande-Bretagne d’absentéisme, sinon de manquer à ses engagements, et qui voudrait ouvrir à l’émi-gration juive la TransJordanie, la Syrie et la péninsule du Sinaï.
Les premiers conflits qui se manifestèrent en août 1929 et qui se déroulèrent autour du Mur des Lamentations, provoquèrent d’après les statistiques officielles, la mort de deux cents arabes et cent trente juifs, chiffres certainement inférieurs à la réalité, parce que si dans les installations modernes, les juifs réussirent à repousser les attaques, à Hebron, à Safit et dans quelques faubourgs de Jérusalem, les arabes passèrent à de véritables pogromes.
Ces événements marquèrent un point d’arrêt de la politique philo-juive de l’Angleterre, car l’empire colonial britannique comprend trop de musulmans, y compris l’Inde, pour avoir suffisamment de raisons d’être prudent.
A la suite de cette attitude du gouvernement britannique envers le Foyer National Juif, la plupart des partis juifs : les sionistes orthodoxes, les sionistes généraux et les révisionnistes passèrent à l’opposition, pendant que le plus sûr appui de la politique anglaise dirigée à cette époque par le Labour Party, fut représenté par le mouvement travailliste juif qui était l’expression politique de la Confédération Générale du Travail, organisant presque la totalité des ouvriers juifs en Palestine.
Récemment, s’était exprimé, en surface seulement, une lutte commune de mouvements juifs et arabe contre la puissance mandataire. Mais le feu couvait sous les cendres et l’explosion consista en les événements du mois de mai dernier.
La presse fasciste italienne s’est insurgée contre l’accusation de la presse "sanctionniste", comme quoi des agents fascistes avaient fomenté les émeutes de Palestine, accusation déjà faite à propos des récents événements d’Egypte. Personne ne peut nier que le fascisme a tout intérêt à souffler sur ce feu. L’impérialisme italien n’a jamais caché ses visées vers le Proche Orient, c’est-à-dire son désir de se substituer aux puissances mandataires en Palestine et en Syrie. Il possède d’ailleurs en Méditerranée une puissante base navale et militaire représentée par Rhodes et les autres îles du Dodécanèse. L’impérialisme anglais, d’autre part, s’il se trouve avantagé par le conflit entre arabes et juifs, car d’après la vieille formule romaine divide et impeta, il faut diviser pour régner, il doit cependant tenir compte de la puissance financière des juifs et de la menace du mouvement nationaliste arabe.
Ce dernier mouvement dont nous parlerons plus longuement une autre fois, est une conséquence de la guerre mondiale qui a déterminé une industrialisation aux Indes, en Palestine et en Syrie et renforcé la bourgeoisie indigène qui posa sa candidature au gouvernement, c’est-à-dire à l’exploitation des masses indigènes.
Les arabes accusent la Grande-Bretagne de vouloir faire de la Palestine le Foyer
National Juif, qui signifierait le vol de la terre aux populations indigènes.
Ils ont envoyé à nouveau des émissaires en Egypte, en Syrie, au Maroc pour
déterminer une agitation du monde musulman en faveur des arabes de Palestine,
afin de chercher à intensifier le mouvement, en vue de l’union nationale
panislamique. Ils sont encouragés par les récents événements de la Syrie où
l’on obligea la puissance mandataire, la France, à capituler devant la grève
générale, et aussi par les événements d’Egypte où l’agitation et la
constitution d’un front national unique ont obligé Londres à traiter en toute
égalité avec le gouvernement du Caire. Nous ne savons si la grève générale des
arabes de Palestine obtiendra pareil succès. Nous examinerons ce mouvement en
même temps que le problème arabe dans un prochain article.
Comme nous l’avons vu dans la précédente partie de cet article, quand, après 2000 ans d’exil, les "Biluimes", acquirent une bande de territoire sablonneux au Sud de Jaffa, ils trouvèrent d’autres peuplades, les Arabes, qui s’étaient substitués à eux en Palestine. Ces derniers n’étaient que quelques centaines de milliers, soit Arabes fellah (paysans) ou bédouins (nomades); les paysans travaillaient avec des moyens très primitifs, le sol appartenant aux propriétaires fonciers (effendis). L’impérialisme anglais, comme on l’a vu en poussant ces latifundistes et la bourgeoisie arabe à entrer en lutte à ses côtés pendant la guerre mondiale, leur a promis la constitution d’un Etat national arabe. La révolte arabe fut, en effet d’une importance décisive dans l’écroulement du front turco-allemand dans le Proche-Orient, car elle réduisit à néant l’appel à la Guerre Sainte lancé par le Khalife Ottoman et tint en échec de nombreuses troupes turques en Syrie, sans parler de la destruction des armées turques en Mésopotamie.
Mais si l’impérialisme britannique avait déterminé cette révolte arabe contre la Turquie, grâce à la promesse de la création d’un Etat arabe composé de toutes les provinces de l’ancien empire ottoman (y compris la Palestine), il ne tarda pas, pour la défense de ses intérêts propres à solliciter comme contre-partie, l’appui des sionistes juifs en leur disant que la Palestine leur serait remise tant au point de vue de l’administration que de la colonisation.
En même temps, il se mettait d’accord avec l’impérialisme français pour lui céder un mandat sur la Syrie, détachant ainsi cette région, qui forme, avec la Palestine, une unité historique et économique indissoluble.
Dans la lettre que Lord Balfour adressait le 2 novembre 1917 à Rothschild président de la Fédération Sioniste d’Angleterre, et dans laquelle il lui communiquait que le gouvernement anglais envisageait favorablement l’établissement en Palestine, d’un foyer national pour le peuple juif et qu’il emploierait tous ses efforts pour la réalisation de cet objectif, Lord Balfour ajoutait que : rien ne serait fait qui puisse porter atteinte soit aux droits civils et religieux des collectivités non juives existant en Palestine, soit aux droits et au statut politique dont les juifs jouissent dans les autres pays.
Malgré les termes ambigus de cette déclaration, qui permettait à un peuple nouveau de s’installer sur leur sol, l’ensemble de la population arabe resta neutre au début et même favorable à l’instauration d’un foyer national juif. Les propriétaires arabes, sous la crainte qu’une loi agraire allait être instituée, se montrèrent disposés à vendre des terres. Les chefs sionistes, uniquement par des préoccupations d’ordre politique ne profitèrent pas de ces offres et allèrent jusqu’à approuver la défense du gouverneur Allenby (6) de vendre des terrains.
Bientôt, la bourgeoisie manifesta des tendances à occuper totalement au point de vue territorial et politique la Palestine en dépossédant la population autochtone et en la repoussant vers le désert. Cette tendance se manifeste aujourd’hui chez les sionistes révisionnistes, c’est-à-dire dans le courant philo-fasciste du mouvement nationaliste juif.
La superficie des terres arables de la Palestine est d’environ 12 millions (7) de « dounams métriques » (le ounam=1 dixième d’hectare) dont 5 à 6 millions sont actuellement cultivés.
Voici comment s’établit la superficie des terres cultivées par les Juifs en Palestine, depuis 1899 :
Colonies Habitants Dounams 1899: 22 5 000 300 000 1914: 43 12 000 400 000 1922: 73 15 000 600 000 1931: 160 70 000 1 420 000.
Pour juger la valeur réelle de cette progression et de l’influence qui en découle, il ne faut pas oublier que les Arabes cultivent encore aujourd’hui la terre d’une façon primitive, tandis que les colonies juives emploient les méthodes les plus modernes de culture.
Les capitaux juifs investis dans les entreprises agricoles sont estimés à plusieurs millions de dollars or, dont 65% dans les plantations. Bien que les Juifs ne possèdent que 14% des terres cultivées, la valeur de leurs produits atteint le quart de la production totale.
Pour ce qui est des plantations d’oranges, les juifs arrivent à 55% de la récolte totale.
C’est en avril 1920, à Jérusalem, et en mai 1921, à Jaffa, que se produisirent, sous forme de pogromes les premiers symptômes de la réaction arabe. Sir Herbert Samuel, haut commissaire en Palestine jusqu’en 1925 essaya d’apaiser les Arabes en arrêtant l’immigration juive, tout en promettant aux Arabes un gouvernement représentatif et en leur attribuant les meilleures terres du domaine de l’Etat.
Après la grande vague de colonisation de 1925, qui atteint son maximum avec 33nbsp;000 immigrants, la situation empira et finit par déterminer les mouvements d’août 1929. C’est alors que vinrent se joindre aux populations arabes de la Palestine, les tribus bédouines de la Transjordanie, appelées par les agitateurs musulmans.
A la suite de ces événements la Commission d’Enquête parlementaire envoyée en Palestine et qui est connue sous le nom de Commission Shaw, conclut que les événements étaient dus à l’immigration ouvrière juive et à la "disette" de terre et elle proposa au gouvernement l’achat de terres pour dédommager le fellah arraché de son sol.
Quand, par après, en mai 1930, le gouvernement britannique accepta dans leur ensemble les conclusions de la Commission Shaw et suspendit à nouveau l’immigration ouvrière juive en Palestine, le mouvement ouvrier juif -que la Commission Shaw avait même refusé d’entendre- répondit par une grève de protestation de 24 heures, tandis que le Poale Zion dans tous les pays ainsi que les grands syndicats juifs d’Amérique, protestaient contre cette mesure par de nombreuses manifestations.
En octobre 1930, parut une nouvelle déclaration concernant la politique britannique en Palestine, connue sous le nom de Livre blanc.
Elle était également très peu favorable à la thèse sioniste. Mais, devant les protestations toujours grandissantes des juifs, le gouvernement travailliste répondit, en février 1931 par une lettre de Mac Donald qui réaffirmait le droit au travail, à l’immigration et à la colonisation juive et autorisait les employeurs juifs à employer la main d’œuvre juive lorsqu’ils préféraient employer cette dernière plutôt que des Arabes sans tenir compte de l’augmentation éventuelle du chômage parmi les Arabes.
Le mouvement ouvrier palestinien s’empressa de faire confiance au gouvernement travailliste anglais, tandis que tous les autres partis sionistes restaient dans une opposition méfiante.
Nous avons démontré, dans l’article précédent, les raisons du caractère chauvin du mouvement ouvrier palestinien.
L’Histadruth - la Centrale syndicale palestinienne - ne comprend que des Juifs (80`% des ouvriers juifs sont organisés). C’est seulement la nécessité d’élever le standard de vie des masses arabes, pour protéger les hauts salaires de la main d’œuvre juive, qui a déterminé, dans ces derniers temps, ses essais d’organisation arabe. Mais les embryons de syndicats groupés dans "l’Alliance" restent organiquement séparés de l’Histadruth, exception faite du Syndicat des Cheminots qui englobe les représentants des deux races.
La grève générale des arabes en Palestine entre maintenant dans son quatrième mois. La guérilla se continue, malgré le récent décret qui inflige la peine de mort aux auteurs d’un attentat : chaque jour se produisent des embuscades et des coups de mains contre trains et automobiles, sans compter les destructions et incendies des propriétés juives.
Ces événements ont coûté à la puissance mandataire déjà près d’un demimillion de livres sterling pour l’entretien des forces armées et, par suite de la diminution des entrées budgétaires, conséquence de la résistance passive et du boycott économique des masses arabes. Dernièrement, aux Communes, le ministre des colonies a donné comme chiffre des victimes : 400 Musulmans, 200 Juifs et 100 policiers ; jusqu’ici 1800 Arabes et Juifs ont été jugés et 1200 ont été condamnés dont 300 Juifs. D’après le ministre, une centaine de nationalistes arabes ont été déportés dans des camps de concentration. Quatre chefs communistes (2 Juifs et 2 Arméniens) sont détenus et 60 communistes soumis à la surveillance de la police. Voilà les chiffres officiels.
Il est évident que la politique de l’impérialisme britannique en Palestine s’inspire naturellement d’une politique coloniale propre à tout impérialisme. Celle-ci consiste à s’appuyer partout sur certaines couches de la population coloniale (en opposant des races entre elles ou des confessions religieuses différentes, ou bien encore éveillant des jalousies entre clans ou chefs), ce qui permet à l’impérialisme d’établir solidement sa super oppression sur les masses coloniales elles-mêmes, sans distinction de races ou de confessions.
Mais si cette manœuvre a pu réussir au Maroc et en Afrique centrale, en Palestine et en Syrie le mouvement nationaliste arabe présente une résistance très compacte. Il s’appuie sur les pays plus ou moins indépendants qui l’environnent : Turquie, Perse, Egypte, Irak, Etats d’Arabie et, de plus, se relie à l’ensemble du monde musulman qui compte plusieurs millions d’individus.
En dépit des contrastes existants entre différents Etats musulmans et malgré la politique anglophile de certaines d’entre eux, le grand danger pour l’impérialisme serait la constitution d’un bloc oriental capable de lui en imposer -ce serait possible si le réveil et le renforcement du sentiment nationaliste des bourgeoisies indigènes pouvait empêcher le réveil de la révolte de classe des exploités coloniaux qui ont à en finir autant avec leurs exploiteurs qu’avec l’impérialisme européen- et qui pourrait trouver un point de ralliement autour de la Turquie, qui vient d’affirmer à nouveau ses droits sur les Dardanelles et qui pourrait reprendre sa politique panislamique.
Or, la Palestine est d’une importance vitale pour l’impérialisme anglais. Si les Sionistes ont cru obtenir une Palestine "juive" en réalité ils n’obtiendront jamais qu’une Palestine "britannique", voie palestinienne des transits terrestres qui relie l’Europe à l’Inde. Elle pourrait remplacer la voie maritime de Suez, dont la sécurité vient d’être affaiblie par l’établissement de l’impérialisme italien en Ethiopie. Il ne faut pas oublier non plus que le pipe-line de Mossoul (zone pétrolière) aboutit au port palestinien de Haïfa.
Enfin, la politique anglaise devra toujours tenir compte de ce que 100 millions de Musulmans peuplent l’empire britannique. Jusqu’ici, l’impérialisme britannique a réussi, en Palestine, à contenir la menace représentée par le mouvement arabe d’indépendance nationale. Il opposait à ce dernier le sionisme qui, en poussant les masses juives à émigrer en Palestine disloquait le mouvement de classe de leur pays d’origine où celles-ci auraient trouvé leur place et, enfin, il s’assurait un appui solide pour sa politique dans le Proche Orient.
L’expropriation des terres, à des prix dérisoires a plongé les prolétaires arabes dans la misère la plus noire et les a poussés dans les bras des nationalistes arabes et des grands propriétaires fonciers et de la bourgeoisie naissante. Cette dernière en profite, évidemment, pour étendre ses visées d’exploitation des masses et dirige le mécontentement des fellahs et prolétaires contre les ouvriers juifs de la même façon que les capitalistes sionistes ont dirigé le mécontentement des ouvriers juifs contre les Arabes. De ce contraste entre exploités juifs et arabes, l’impérialisme britannique et les classes dirigeantes arabes et juives ne peuvent que sortir renforcées.
Le communisme officiel aide les Arabes dans leur lutte contre le sionisme qualifié d’instrument de l’impérialisme anglais.
Déjà, en 1929 la presse nationaliste juive publia une liste noire de la police où les agitateurs communistes figuraient aux côtés du grand Mufti et des chefs nationalistes arabes. Actuellement, de nombreux militants communistes ont été arrêtés.
Après avoir lancé le mot d’ordre "d’arabisation" du parti -celui-ci, comme le P. C. de Syrie ou même d’Egypte a été fondé par un groupe d’intellectuels juifs qui fut combattu comme "opportuniste"- les centristes ont lancé aujourd’hui le mot d’ordre de "l’Arabie aux Arabes" qui n’est qu’une copie du mot d’ordre "Fédération de tous les peuples arabes" devise des nationalistes arabes, c’est-à-dire des latifundistes (effendi) et des intellectuels qui, avec l’appui du clergé musulman, dirigent le congrès arabe et canalisent, au nom de leurs intérêts, les réactions des exploités arabes.
Pour le vrai révolutionnaire, naturellement, il n’y a pas de question
"palestinienne", mais uniquement la lutte de tous les exploités du
Proche-Orient, arabes ou juifs y compris, qui fait partie de la lutte plus
générale de tous les exploités du monde entier pour la révolte communiste.
Les événements d’Espagne et même ceux de Chine sont déjà vieux. Des faits nouveaux se produisent avec une croissance extraordinaire. A côté des coups de clairon de Mussolini et Hitler, ou des décisions de « police » en Méditerranée effectuée par les flottes anglo-française en collaboration avec la flotte italienne, et visant à rechercher les pirates « inconnus », nous avons la situation dans le Proche Orient où se dégage avec relief le projet de division de la Palestine en un Etat juif et arabe, ce qui a provoqué un mécontentement dans les deux camps. Prenant prétexte d’une série d’attentats terroristes qui eurent leur point culminant avec l’ assassinat d’un haut fonctionnaire britannique de la Galilée, le Haut Commissaire de la Palestine a mis hors la loi le Comité Exécutif Arabe et donne la chasse aux chefs nationalistes arabes afin de les déporter sur les îles lointaines de Seychelles.
Nous nous attarderons cette fois-ci sur le problème national arabe. On confond généralement les Arabes avec le reste des musulmans. C’est particulièrement parce que jusqu’à la guerre mondiale ils furent assujettis aux Turcs(Ottomans) avec lesquels I’unique affinité était la religion commune musulmane. Les Arabes, tant les sédentaires que les nomades, sont tout au plus 40 millions (5 millions en Mésopotamie, Syrie et Palestine ; 6 millions dans l’Arabie proprement dite ; 15 millions en Egypte et en Tripolitaine et 12 millions dans le Maghreb, c’est-à-dire le Maroc et l’Algérie méridionale), mais ils se considèrent la race « élue » parce qu’en leur sein a surgi Mahomet. Cependant, ils sont entre eux extrêmement différents, soit ethniquement, soit religieusement. Ethniquement, parce que la conquête fut faite par les successeurs du Prophète à la tête de quelques dizaines de milliers de Bédouins nomades du désert arabique qui imposèrent leur domination sur les populations indigènes. Religieusement, parce que s’ils sont dans leur presque totalité des musulmans, ils sont divisés dans les différentes sectes de l’hérésie islamique. Bien que le mouvement de renaissance nationale, c’ est-à-dire pan-arabe, soit plus ancien, en réalité, le problème arabe peut être considéré comme ayant surgi de la guerre de 1914.
Durant ce conflit impérialiste une infime minorité seulement des Arabes suivit la tendance pan-islamique proclamée par la Turquie et appuyée par I’Allemagne. La majorité des Arabes fut gagnée, par suggestion directe de l’impérialisme anglais, à l’idée de la libération du joug turc et de la constitution d’un Etat arabe indépendant (surtout les populations du désert d’Arabie où s’effectua l’action du trop célèbre Lawrence). Par contre, en Egypte il était naturel que ce mouvement fut moins intense, parce que l’Eqypte était de fait déjà indépendante de la Turquie et la domination étrangère était précisément l’Angleterre qui profita de la guerre pour imposer son « protectorat » qui n’était que la sanction de son occupation effective de1882.
Le chérif de la Mecque, qui s’était proclamé pompeusement « Roi d’Arabie », fut reconnu sous le nom plus modeste de roi de l’Hedjaz en 1916. Le résultat le plus important de cette politique habile « de diviser pour régner »opposant l’une à l’autre les deux fractions les plus importantes du monde musulman : les Arabes contre les Turcs, fut d’empêcher la proclamation de la Guerre Sainte qui aurait pu mettre en branle les populations islamiques des colonies de l’Entente.
La guerre ayant fini avec le démembrement de l’Empire Ottoman - la Turquie fut réduite au rang d’une puissance asiatique secondaire jusqu’à sa reprise avec Kemel Pacha - les Arabes se trouvèrent naturellement déçus dans leurs aspirations : les brigands impèrialistes ne cédant rien de ce qu’ils avaient volé.
L’impérialisme britannique maintient sous la forme de mandat la Palestine (où au surplus il créa un Foyer National pour les Juifs, afin de récompenser les sionistes, ses plus fidèles agents), l’Irak (c’est-à-dire la Mésopotamie et la Transjordanie.
Et quant à l’Egypte, où fut imposé un roi plus docile à ses exigences, il lui fut concédé en 1922 une « indépendance » purement fictive, alors que le Soudan restait complètement sous son occupation.
La France reçut le mandat sur la Syrie. En somme, les Arabes se trouvaient devoir subir une oppression bien plus massive que celle du « Grand Malade ».
Seulement, c’est dans les déserts d’Arabie que se formèrent des Etats nationaux : le Cherif de la Mecque resta roi de l’Hedjaz et deux de ses fils devinrent l’un Emir de la Transjordanie et l’autre roi de l’Irak. Les autres Etats furent l’Emirat de Nedjedet l’Imamat du Yemen.
En somme, tous les peuples arabes restèrent dominés par l’impérialisme européen sous une forme ou l’autre : au travers des vieilles dynasties des rois d Egypte, des sultans du Maroc, des beys de Tunisie ou des nouveaux rois vassaux de l’Irak, de la Transjordanie, ou sous la forme de mandats de la Société des Nations. Et ce qu’entendent les impérialistes par des « mandats », le Japon l’a prouvé avec les îles du Pacifique et la Grande-Bretagne avec son mandat en Afrique orientale.
Dans les autres pays arabes, l’impérialisme continua à dominer directement, comme l’Italie en Lybie, ou la France en Algérie.
Et même les Etats de l’Arabie, malgré leur nom « d’indépendants », restent, grâce à leur état arriéré, sous la domination économique de l’impérialisme britannique, à laquelle le Yémen voudrait se soustraire en se jetant dans les bras de l’impérialisme italien avec lequel il vient d’ailleurs de conclure un traité. La puissance unifiée arabe dont rêvent les nationalistes arabes et que voudrait réaliser dans son propre intérêt le souverain Wohabite de l’Arabie Saoudite (surgi de l’unification du Hedjaz et du Nedjed) ne pourrait être, en dernière analyse, qu’un satellite de l’impérialisme anglais, parce que la péninsule arabique reste d’une très grande importance stratéqique comme voie vers les Indes, surtout depuis que l’impérialisme italien s’est installé en Ethiople et menace l’autre voie impériale qui passe par Suez. Cet État arabe, en plus de l’Arabie proprement dite, devrait comprendre la Transjordanie à laquelle seraient rattachées la Palestine et la Syrie.
Cela évidemment heurte l’impérialisme français qui a fait de la Syrie sa base stratégique pour la Méditerranée orientale,particulierement après le réarmement turc dans les Dardanelles (8).
Mais aussi l’impérialisme italien a ses visées dans le Proche Orient. Non seulement il voudrait se substituer au monopole religieux que détenait la France, comme sauvegarde de la chrétienneté, mais il aurait voulu se substituer à la France pour le mandat sur la Syrie et, enfin, comme nous l’avons déjà dit, il cherche à appuyer ses manœuvres sur le Yémen.
Comme l’on voit, dans le Proche Orient également les différents impérialismes s’opposent et l’on pourrait ainsi repérer un nouveau centre névralgique.
Comme on sait, l’Egypte a obtenu - ainsi qu’en 1932 l’Irak - son entrée dans la S.D.N. Mais cette espèce de certificat de bonne conduite que les impérialistes hégémoniques concèdent aux pays coloniaux ou semi-coloniaux, ne les garantit en rien, comme l’Ethiopie l’a appris à ses frais.
L’entrée de l’Egypte dans le Conseil de Genève, au lendemain de la Conférence de Montreux de cette année - celle qui a aboli les « capitulations » (9) - renforce donc le courant qui voudrait constituer avec la Turquie, l’Iran (nom officiel de la Perse), l’Afghanistan, l’Irak et prochainement, sans doute, la Syrie et le Liban, une sorte de Petite Entente musulmane qui pourrait jouer un rôle important au cours des événements, comme stimulant aux populations islamiques sujettes de l’impérialisme européen. En fait, des deux cent cinquante millions de musulmans, les 80 p.
C. dépendent de ce dernier. 95 millions dépendent de l’Empire britannique ; 55 millions des Pays-Bas (Iles de la Sonde), 22 millions de la France.
Et quel rôle la masse des exploités joue -t-elle dans tout cela ? Il est une caractéristique commune et décisive pour tous les pays arabes qui, de la même façon que tous les leviers de commande politiques dépendent des impérialismes anglais, français, italien, espagnol (Maroc), ont aussi toute leur vie économique entre les mains du capital financier étranger : banques et fabriques ; bétail et pâturages ; moyens de production et de communication ; dette publique... etc..., etc. Et même les systèmes d’irrigation artificiels qui sont vitaux pour les populations arabes parce qu’elles habitent dans les steppes et les déserts où leur existence dépend pour tout de cette irrigation artificielle, sont entreses mains.
L’impérialisme « étranger » transformant les pays arabes en appendices agraires et en fournisseurs de matières premières pour la métropole, s’appuie naturellement sur les propriétaires fonciers féodaux, sur la bourgeoisie commerciale et sur le clergé.
Particulièrement, dans les pays arabes ce sont les propriétaires fonciers qui dominent, alors que le développement de l’élément capitaliste se réduit à quelques couches subtiles de bourgeoisie commerciale plus ou moins reliées aux propriétaires fonciers féodaux. Seulement l’Egypte se détache parce que, comme aux Indes, durant la guerre s’est formée une industrie qui a renforcé la bourqeoiste et a donné naissance à un prolétariat. Egalement la bourgeoisie nationale égyptienne s’est appuyée sur l’agitation ouvrière pour réaliser ses fins politiques, quitte à persécuter par la suite le mouvement ouvrier lorsqu’elle vint au pouvoir avec l’aide intéressée de l’impérialisme anglais.
Les fellahs (arabes sédentaires) et bédouins (arabes nomades) sont ainsi soumis à la double exploitation nationale et étrangère ; aux vols de terre et de bétail ; soumis à une exploitation inouïe sous des formes différentes par leur nom mais égales par le résultat : au fléau de l’usure. L’on ne doit pas sous-estimer l’influence du clergé : le Grand Cherif de la Mecque, le Grand Mufti de Jérusalem, le Patriarche Maronite du Liban, sont les soutiens de l’impérialisme de la même envergure que l’Abouna (le chef de l’Eglise Copte en Abyssinie) qui fut parmi les premiers à reconnaître les conquérants italiens.
Le centrisme évidemment fait beaucoup de cas des mouvements nationalistes dont il invite des représentants à ses congrès « anti-impérialistes ». Mais, il est certain que le Wafd en Egypte, le Comité Exécutif arabe en Palestine, le « Bloc National » en Syrie, le Destour (parti nationaliste) de Tunisie sont plutôt prêts à pactiser avec l’impérialiste. Et s’ils se sont mis à la tête d’agitations de type violent, ils l’ont fait afin d’essayer de les freiner et empêcher qu’une solution de classe intervienne. Tout comme pour l’impérialisme étranger, pour les classes privilégiées arabes, l’ennemi est le même : la masse des exploités qui cherche sa voie. La grande révolte du Maroc de 1924-26 (Abd-el-Krim), de Syrie en 1925, les mouvements en Palestine de 1929 et 1936, les agitations en Tunisie et en Egypte, sont beaucoup moins l’œuvre des nationalistes que l’expression d’un mécontentement des masses contre leur double exploitation.Moins encore l’ œuvre de la « main rouge » de Moscou.
Dans les pays plus développés économiquement existent des syndicats – dans tous les pays musulmans existent des corporations qui dans bien des cas ont servi comme noyaux pour les organisations ouvrières - et les grèves ainsi que l’agitation ouvrière sont à l’ordre du jour. Mais la plupart de ces syndicats sont dans lesmains des nationalistes-réformistes avec lesquels le centrisme réalise aujourd’hui le front unique.
Dans les pays arabes économiquement les plus arriérés : au Maroc, dans le sud de l’Algérie, en Lybie, l’unique forme de réaction des masses contre l’exploitation économique et la perspective d’être inévitablement la chair à canons pour les conflits Impérialistes, est représenté par la révolte des tribus contre l’oppresseur dont l’exemple typique fut le soulèvement d’Abd-el-Krim.
Il y a évidemment dans le Proche Orient des partis communistes, tout au moins en Egypte, en Palestine, en Syrie et en Afrique du Nord française. Mais ils sont tous excessivement faibles numériquement et soumis à la plus impitoyable répression de la France et de l’Angleterre « démocratques ». Leur histoire interne est représentée par la tendance vers « l’arabisation» réclamée par Moscou et qui signifie en mots simples l’intégration dans le mouvement nationaliste. Naturellement. il ne manque pas de trotskistes et nous savons ce que cela signifie.
[NB : Les évaluations finales suivantes ne seront pas confirmées par des études ultérieures du parti].
Dans l’appréciation de tous les problèmes nationaux, nous nous heurtons au fait des positions inachevées, incomplètes que la III Internationale, dans sa période révolutionnaire, a fixé pour les pays coloniaux. Toutes ces positions incomplètes, erronées, envisageant une lutte commune entre exploités et mouvements nationalistes bourgeois, se soldent par des massacres et par la canalisation de l’effervescence des masses derrière le nationalisme bourgeois, c’est-à-dire derrière l’impérialisme avec lequel un compromis sera toujours trouvé.
Pour les autres pays, les centristes soutiennent que « les communistes doivent opposer au national-réformisme contre-révolutionnaire et capitulard, le front révolutionnaire pan-arabe et anti-impérialiste des masses de travailleurs et de la petite bourgeoisie des villes, front qui s’appuie sur le développement des mouvements ouvriers ». Cela nous pouvons le lire dans les thèses sur les tâches des communistes dans le mouvement arabe.
Comment, en fait, on applique cette tactique de front révolutionnaire, les
masses chinoises l’apprennent à leurs dépends, qui sous la bannière des
bourreaux du Kuomintang (et poussées par les centristes alors que Trotski joue la même musique), doivent réaliser la 3° Révolution en s’associant à la guerre impérialiste.
1. Moldavie
2. Les pogroms de Kichinev, capitale de la Bessarabie alors russe (aujourd’hui la Moldavie) eurent lieu en 1903 et firent 49 morts et 92 blessés sur trois jours, et en octobre 1905 et firent 19 morts et 56 blessés. Il y eut un retentissement international et ces pogroms devinrent pour les premiers sionistes un argument mobilisateur.
3. Borochov né dans l’empire russe fut un des fondateurs du mouvement sioniste socialiste ou Poale Sion et prona en 1903 l’émigration vers la Terre d’Israël et non le projet en Ouganda. Il mourut en décembre 1917 d’une pneumonie en Russie. Pour lui les prolétaries arabes et juifs ont des intérêts communs dans la lutte des classes en Palestine.
4. La Légion juive (1917-21) est le nom donné à cinq bataillons de volontaires juifs dans le corps des Royal Fusiliers de l’armée britannique combattant l’Empire ottoman en Palestine durant la première guerre mondiale.
5. Vladimir Ze’ev Jabotinsky originaire de l’Ukraine russe est le fondateur de la Légion juive et crée en 1925 le parti révisionniste, principal parti de la droite nationaliste sioniste, et sera le principal inspirateur de l’organisation combattante clandestine sioniste l’Irgoun
6. Le général Allenby fut nommé commandant de la force expéditionnaire britannique en Egypte en 1917 avec pour objectif Jérusalem contre les forces ottomanes et est victorieux à Gaza fin 1917 puis à Jérusalem. Il vise Damas -Beyrouth et en 1919 il est haut commissaire pour l’Egypte et le Soudan jusqu’en 1925. En 1931 il justifie la campagne de Palestine pour permettre de bloquer la route de l’Inde à l’Allemagne.
7. Soit 1,2 million
8. La conférence de Montreux en 1936 a permis la remilitarisation des Détroits et a eu comme bénéficiaire, en dernière analyse, la Russie, qui pourra construire dans la Mer Noire une flotte de guerre, garantie par la Turquie son alliée, contre l’intrusion des autres puissances navales et qui disposera du libre passage pour ses navires… sauf le cas où elle rencontrait des « pirates à l’entrée de la Méditerranée.
9. Les capitulations étaient l’instrument juridique de la pénétration européenne en Orient et elles garantissaient aux étrangers un statut privilégié dans le domaine commercial et judiciaire. Elles furent instituées au début envers les Sultanats turcs et accompagnèrent l’expansion successive de la « civilisation » contre la « barbarie ». Abolies en Turquie, en Chine, en Afghanistan, dans les pays sous mandat, elles subsistaient encore en Egypte qui en avait hérité de son appartenance à l’Empire ottoman.